SBF 120 : des rémunérations variables à trop court terme pour les dirigeants

Par Alain Chaigneau

Comme chaque année, le rapport de Proxinvest analyse l’évolution des rémunérations des dirigeants exécutifs des sociétés de l’indice SBF 120. Ces chiffres figurent dans le document de référence de l’exercice 2013 et ont été déjà commentés par la presse, notamment Le Revenu qui leur a consacré une enquête en collaboration avec le cabinet Ethics & Boards (*).


La grille d’analyse de Proxinvest, un cabinet qui conseille notamment les investisseurs lors du vote des résolutions présentées aux assemblées générales des sociétés cotées, valorise l’ensemble des rémunérations des dirigeants. Elles comprennent la partie fixe, bien sûr, mais aussi variables (bonus annuel, jetons, avantages en nature, stock-options, actions gratuites, plans d’intéressement et autres formes indirectes).

En 2013, Arnaud Lagardère, gérant commandité associé de Lagardère SCA, s'est classé en tête des rémunérations du SBF 120, avec un total de 16,6 millions d’euros. Ce montant s’est trouvé gonflé (+296%) par l’attribution de 13,1 millions d’euros, une somme liée à la plus-value de cession de la participation de Lagardère dans EADS.

Au deuxième rang, Proxinvest a placé la rémunération totale de 11 millions d’euros de Bernard Arnault, dont 2,2 millions d’euros de bonus annuel inchangé depuis l’exercice 2008. Le cabinet met cette rémunération en rapport avec des résultats 2013 de LVMH «pas exceptionnellement brillants» puisque le bénéfice net a été stable. Par ailleurs, Bernard Arnault a bénéficié d’un plan d’actions gratuites, aux conditions de performance « peu exigeantes », selon Proxinvest.

La troisième position du classement est occupée par David Jones, ancien directeur général d’Havas. L’indemnité de départ de 5,4 millions d’euros «ne semble pas conforme au code Afep-Medef puisque ledit départ n’était pas officiellement contraint», soutient le cabinet de conseil.
Comme chaque année, Proxinvest calcule la rémunération de Carlos Ghosn en additionnant celle qu’il perçoit au titre de président de Renault à celle touchée comme dirigeant de Nissan, l’autre membre de l’alliance, soit 9,7 millions d’euros au total, dont 7 millions via le constructeur japonais. Le cabinet déplore que la nature et les critères de calcul de la rémunération que lui verse Nissan «manquent encore de précision, malgré un article du code de commerce, précis sur le sujet».

Chris Viehbacher, l’ex-directeur général de Sanofi évincé de son poste, fin octobre, a été le dirigeant exécutif le mieux payé du CAC 40, comme l’avait déjà noté Le Revenu. Au cinquième rang du SBF 120, il a perçu 8,65 millions d’euros au titre de l’exercice 2013. Ce montant inclut toutefois une rémunération en actions de 5 millions d’euros dont il ne devrait pas bénéficier, explique Proxinvest, du fait de conditions de présence dans l’entreprise non remplies.

Le cabinet qui constate la disparition quasi-totale des stock-options critique les critères de performance fixés aux dirigeants pour obtenir ce type de rémunération variable : «Moins d’un dirigeant sur deux possède une rémunération de long terme, ce qui est préoccupant pour les investisseurs». Proxinvest pointe aussi l’absence de transparence des rémunérations différées comme les retraites-chapeau, dont seuls six dirigeants du CAC 40 ne bénéficient pas.

Le conseil des institutionnels préconise donc d’allonger à cinq ans la durée de la mesure de performance des dirigeants nécessaire à l’obtention d’un plan de rémunération variable. Proxinvest souhaite aussi la mise en place, en France, d’un mécanisme de restitution des rémunérations variables tel qu’il est envisagé dans les banques américaines.   Le cabinet observe que la rémunération moyenne (2,9 millions d’euros) des dirigeants exécutifs du SBF 120 n’a progressé que de 1,2% en 2013. L’Etat actionnaire a joué son rôle de modérateur, ce qui peut encore mieux se vérifier pour le CAC 40 car la rémunération moyenne de ses dirigeants y a reculé, elle, de 2,5% mais à 3,968 millions. Proxinvest regrette néanmoins que dix-huit dirigeants bénéficient d’une rémunération supérieure à 4,76 millions d’euros, soit l’équivalent de 240 SMIC, un plafond que le conseil juge «socialement acceptable».

(*) Voir Le Revenu (hebdo) n° 1273 du 25 avril 2014.











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